RUE DES CAPUCINS
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A l'origine, cette rue portait le nom de rue de la Grande Gherlande, nom qui lui vient du fait qu'elle longeait l'enceinte comtale qui passait approximativement par les rues actuelles de la Terre du Prince et des Cinq Visages, formant une « guirlande ».
C'est dans cette rue que les Capucins vinrent s'installer en 1595 grâce au don que leur fit la duchesse d'Aarschot, douairière du duc Philippe de Aarschot, de l'hôtel, dit de Trélon, qu'elle possédait à Mons. La générosité des magistrats de la ville et des bienfaiteurs privés aida les Pères Capucins à transformer cette demeure en un couvent permettant l'établissement d'un grand nombre de religieux. Les vocations étant devenues nombreuses suite à la période de paix qui suivit les guerres de religion et le rétablissement dans les Pays-Bas du sud de la foi catholique prônée par le gouverneur Alexandre Farnèse.
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Toute la population, les uns par leurs libéralités, les autres par leur travail – même des étudiants y sacrifièrent leurs loisirs – s'unit pour hâter cette transformation et la construction de l'église, et le 16 juillet 1599, l'évêque de Namur (celui de Cambrai dont dépendait Mons étant vacant), Monseigneur Jacques Blaise, procéda à la consécration et à la dédicace de l'église conventuelle.
Le couvent des Capucins, situé à front de la rue de la Gherlande, occupait presque tout le côté droit, en descendant, de la rue des Orphelins.Tous les jardins situés sur la rive droite de la Trouille, depuis le pont de Orphelins (alors situé face à la rue qui porte encore ce nom) jusqu'au pont du Béguinage (bas de la rue de Cantimpret) appartenaient au couvent. Il avait une issue dans cette même rue.
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Malheureusement, en 1621, sans doute construite trop hâtivement, il fallut abattre l'église, le bâtiment menaçant ruine. Réédifiée, elle fut consacrée en 1623 par l'archevêque de Cambrai, François Vanderbugh qui accorda une indulgence à qui la visiterait. En 1691, lors du siège de Mons par les troupes de Louis, le couvent fut endommagé par les bombardements. Il le fut encore en 1709, lors du siège de la ville par le prince Eugène au lendemain de la victoire de Malplaquet . Ces deux sièges avaient fortement ébranlé le couvent et l'on se vit dans l'obligation de le démolir. Grâce à la générosité de bienfaiteurs, on put rapidement mener à bien cette restauration.La première pierre de cette nouvelle construction fut posée le 26 mars 1732 par l'abbé de Saint-Denis en Brocqueroy. Ce troisième couvent, lui aussi, eut à souffrir du siège et de la prise de Mons par le prince François de Conti et l'armée française en 1746.
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Tandis que le traité de 1748 rendait les Pays-Bas à l'Autriche, une période de paix s'ensuivit qui ranima l'activité économique et amena l'émancipation intellectuelle du peuple qui le prépara à accueillir favorablement les idées révolutionnaires de 1789. Les Capucins furent expulsés de Mons pendant les derniers jours de 1796 - la communauté comptait seize religieux-prêtres, cinq frères et deux novices - leur biens inventoriés et le couvent fut vendu aux enchères en 1798 et démolis. Les acquéreurs furent les brasseurs Delrue et Hossart.
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Parmi les privilèges dont jouissait cet ordre mendiant, il en était un qui mérite quelques lignes : Les pères capucins avaient le droit d'engraisser un cochon (Saint-Antoine était leur saint patron) et de laisser courir par la ville la brave bête, aussi mendiante que les bons pères qui l'élevaient. Elle allait se nourrir par-ci par-là des déchets que pouvaient jeter les concitoyens et des légumes des jardins mal clôturés. L'esprit picard des Montois n'étant jamais à court d'une bonne occasion et d'une bonne plaisanterie, on vit, dans la ville, se multiplier des soit-disant cochons de Capucins, qui se nourrissaient de mendicité publique. L'administration mit fin à ces abus en munissant le cochon des religieux, le seul, le vrai, d'un signe distinctif (1).
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Les pères capucins revinrent à Mons en 1863 occuper l'ancien couvent des soeurs capucines à la rue du Rivage (actuelle rue Masquelier). Les soeurs avaient été expulsées par un édit de Joseph II en 1783. (Voir cette rue)
1 Eric Deroisy. Histoires de Mons. Aux coins des rues.
Photos prétexte.
PLACE DES MARTYRS 1
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Cette place, qui portait jadis le nom de Trou Oudart a été rebaptisée en 1919 pour commémorer l'exécution, le 23 août 1914 à cet endroit, des Montois otages des troupes allemandes. Une plaque rappelant leur nom y a été apposée. Mais, voici le récit des événements :
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Après une nuit tranquille, le soleil s’est levé, chassant les quelques bancs de brouillard qui s’étaient formés dans les plaines. Une belle journée d’été s’annonçait. Vers 8h30, on a entendu les premiers coups de canon, tout proches, en direction de Saint-Denis – Obourg, mais aussi en direction de Nimy et Casteau. Au fil des heures, la canonnade s’est intensifiée pour devenir infernale. De temps à autre, elle cessait, pour reprendre quelques temps après. Des citadins sont montés jusqu’au parc du château et tentent de deviner au bruit du canon le cours de la bataille.
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Vers onze heures, des shrapnels éclatent dans le quartier du Mont du Parc, tandis que le collège Saint-Stanislas et le Sacré-Coeur sont touchés par des obus. D’autres tombent ici et là, heureusement sans faire de victimes. Les batteries doivent être installées derrière le village de Ghlin.
La canonnade se rapproche, les coups sont de plus en plus formidables. Quelques familles préfèrent évacuer leur habitation de la rue du Mont du Parc, de plus en plus exposée.
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Pendant les périodes où l’artillerie cessait les tirs, on entendait du côté du pont-rail de Nimy les aboiements des mitrailleuses allemandes auxquels répondaient les claquements secs des fusils britanniques. Les échanges étaient soutenus, mais on voyait de plus en plus de compagnies britanniques refluer vers la cité par la chaussée de Bruxelles. A un moment, on perçut une violente explosion. Un pont venait de sauter du côté de Ghlin. Dans l’après-midi, de plus en plus de soldats britanniques firent retraite et se regroupaient sur la Grand-Place. On tirait dans les rues, des coups de feu étaient également échangés du côté de la Bascule. Apparemment, le rapport de force tournait en notre défaveur.
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Au loin s’élevaient d’épaisses fumées noires, tout le village de Nimy semblait en flammes. Nous avons appris par après qu’une dizaine de tirailleurs s’étaient efforcés de retenir l’avancée des Allemands en leur causant beaucoup de pertes, déclenchant ainsi un bombardement destructeur. Quand celui-ci cessa, les Allemands avancèrent, ivres de rage, semant partout la terreur, incendiant de nombreuses maisons.
On en a dénombré septante-six par la suite. Ils tiraient au hasard dans les rues sur tout ce qui bougeait, obligeant les habitants à se terrer dans les caves et dans les jardins. Craignant les tireurs embusqués, hantise de la guerre de 1870, ils jetaient du pétrole, qu’ils enflammaient, dans les soupiraux des caves, tiraient sur la population qui fuyait de tous côtés. Des vieillards, des femmes, des enfants furent abattus ou blessés sans raison. On raconte que les soldats dévastaient les maisons abandonnées, cherchant partout les partisans. Ceux qui étaient pris étaient rassemblés dans les rues, les hommes ont été isolés, gardés par des sentinelles, baïonnette au canon, tandis que les femmes et les enfants furent lâchés sur la route de Mons.
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Terrible révélation, cette guerre qui se voulait moderne était aussi une guerre totale. A Mons, la ville avait pris l’allure d’un cimetière. Pas une âme dans les rues. Les couleurs nationales qui, la veille encore, étaient fièrement arborées avaient disparu.
C’est alors que se déroula une scène ignominieuse : sur la chaussée de Bruxelles apparut le groupe de civils pris en otages. Les malheureux devaient marcher au milieu de l’avenue et les Allemands se cachaient derrière eux pour se protéger. Voyant cela, les soldats britanniques, qui s’étaient retranchés en bas de la rue de Nimy pour ralentir leur progression, n’eurent plus qu’à se replier et remonter vers la Place. Pendant leur lâche progression, on voyait les Allemands enfoncer des portes pour faire sortir d’autres civils et les utiliser également comme bouclier. Ces hommes en uniforme vert-de-gris étaient terribles à voir : sales, couverts de poussière, le visage noirci par la poudre, ils avançaient comme des bêtes fauves, se méfiant de tout.
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A un moment donné, un parlementaire s’est courageusement avancé et a été emmené devant les officiers. C’était le prince Ferdinand de Croy, curé-doyen de Sainte-Waudru, qui parlait leur langue pour avoir été délégué par Rome à la nonciature de la Cour de Vienne et qui essayait de les convaincre que la ville ne serait pas défendue. Mais en vain. Tout ce qu’il obtint, avec l’aide du bourgmestre Jean Lescarts, ce fut la libération des femmes, des enfants et de quelques vieillards qui furent renvoyés aussitôt chez eux. Car, durant ces événements dramatiques, le bourgmestre et tout le Collège Communal s’étaient réunis à l’Hôtel de Ville afin de faire bloc.Vers quinze heures trente, un officier allemand, revolver au poing, entouré de quelques soldats, s’y était engouffré. Il en était ressorti quelques instants plus tard, poussant devant lui le bourgmestre, le sommant de l’accompagner pour rencontrer le commandant des troupes qui se trouvait au bas de la rue de Nimy.
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Cédant à l’injonction, le bourgmestre fut conduit, ainsi que son interprète, Mr Jean Lonheux, professeur d’allemand à l’Athénée, en présence du commandant allemand. Celui-ci lui assura que des civils avaient tiré sur ses soldats. Mr Lescarts protesta, expliquant qu’il avait fait déposer toutes les armes en lieu sûr et invité la population à ne commettre aucun acte belliqueux à l’encontre de l’armée allemande. Il certifia en outre qu’aucun coup de feu n’avait été tiré dans la ville. Ce qui était vrai. Alors, il fut forcé de prendre place au premier rang des otages pour éviter, comme ils le prétendirent, à ses concitoyens et à la ville les plus grands malheurs2. C’est ainsi qu’en échange, les femmes, les enfants et les vieillards furent libérés.
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Dès lors, le sinistre cortège se remit en marche. Les otages étaient maintenant une centaine quand ils débouchèrent sur la Grand-Place, agitant leurs mouchoirs en guise de drapeaux blancs. Toutes les personnes présentes étaient comme statufiées dans l’expectative de ce qui allait arriver. Dans un silence impressionnant, la tension était palpable. Le groupe poursuivit alors sa lente progression angoissante par la rue de la Chaussée, jusqu’à la rue de Bertaimont. Derrière eux, des troupes allemandes commençaient à se déployer dans la ville en chantant des hymnes patriotiques pour fêter leur entrée. Vers 16H00, les soldats et les otages firent halte au coin de la rue des Capucins.
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Une dame apporta deux grands seaux d’eau pour permettre aux soldats de se désaltérer. On apprit par la suite que cette dame était d’origine allemande. Fait incroyable, pendant cette pose, le commandant du détachement prit le temps d’aller se faire raser chez le coiffeur Lété situé à deux pas de là. Il paraît que c’est sous la menace d’un revolver que l’opération eut lieu. Heureusement, la main du barbier n’a pas tremblé, mais il s’en est quand même souvenu longtemps. En tout cas, il a été payé par l’officier qui, satisfait, est parti tranquillement rejoindre ses hommes. Et la troupe se remit en route, toujours précédée des otages, on imagine dans quel état d’esprit !
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Jusque-là, les choses ne s’étaient pas trop mal passées. Malheureusement, en arrivant au lieu-dit Grand Trou Houdart, des coups de feu claquèrent. Les Britanniques, qui s’étaient retranchés à mi-pente de l’Héribus, au Trieu de Bertaimont, ont ouvert le feu, prenant le bas de la rue de Bertaimont en enfilade. Aussitôt, les civils et les militaires se jetèrent au sol ou tentèrent de s’enfuir. Les Allemands ont bien sûr riposté. Dans l’échange de tirs, quatre otages furent tués, une douzaine d’autres blessés. Deux mourront encore de leurs blessures. Le bourgmestre, tout de suite entouré, échappa de peu à la mort. Blessé à la main, il fut entraîné par son entourage en direction de l’abattoir. L’affaire prenant une tournure sérieuse, les Allemands demandèrent aussitôt du renfort. Un canon démonté fut acheminé en toute hâte, et dès qu’il fut remonté, il se mit à tirer vers la barricade anglaise installée au Trieu, mais en pure perte car les Britanniques s’étaient retirés entre-temps. Par contre, l’obus fit six victimes parmi les habitants qui, n’ayant plus rien entendu, étaient imprudemment sortis de chez eux. Du côté allemand, on était furieux, et pour se venger, les attaquants boutèrent le feu à la maison formant le coin de la rue de Bertaimont et de la rue Lamir, feu qui malheureusement s’étendit à quatre maisons contiguës. Après cela, ils s’avancèrent prudemment vers les hauteurs du Mont Héribus où, n’ayant rencontré aucune résistance, ils s’installèrent pour la nuit 3.
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1 Extraits de « l'épée de l'Empereur » Notes de Adolphe Hambye. Philippe Yannart. Ed Mémogrames. 2014.
2 Emile Hublard. Les batailles de Mons, Août 1914 – Novembre 1918.
3 Yves Bourdon. Le premier choc, la bataille de Mons. 2014.
RUE DE LA GROSSE POMME
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Anciennement rue Dessous l'Encloître du Chapitre (de sainte Waudru), elle porta ensuite le nom de rue des Dames Oiseuses (citée en 1569), puis de rue des Carmélites enfin du Prince de Ligne, le temps que ces personnes eurent une résidence dans cette rue, noms glorieux que lui fit finalement perdre... une vulgaire enseigne d'hôtellerie dite « A la Grosse Pomme »
Mais commençons par la rue « Dessous l'Encloître ». Cet encloître était, comme son nom l’indique, un véritable enclos de forme rectangulaire bordé à la fois par la collégiale Sainte-Waudru et par les maisons de maître qu'occupaient les chanoinesses. A son extrémité ouest, il était fermé par deux portails monumentaux donnant accès aux habitations situées derrière. Ces maisons étaient entourées de jardins et de vergers qui surplombaient d'une dénivellation de plusieurs mètres la rue de la Grosse Pomme, empêchant toute communication vers celle-ci.
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Cette dénivellation était l'ancienne trace de l'enceinte érigée au XIIe siècle par le comte de Hainaut, Baudouin IV, dit le Bâtisseur et poursuivie par son fils Baudouin V, qui englobait le château comtal, les chapitres de Sainte-Waudru, de Saint-Germain, l'église Saint-Pierre et la petite agglomération montoise occupant le sommet de la colline. Depuis la rue de la Grosse pomme elle passait par les rues Notre-Dame Débonnaire, Marguerite Bervoets ; descendait le long de la Cronque-rue pour aller rejoindre la rue des Clercs, à proximité de la porte principale qui débouchait sur le Markiet (Porta Fori), puis, elle longeait la rue de la Chaussée jusqu'à l'actuelle rue Samson ou se situait une autre portes, la Porta Sancti Germani, puis elle empruntait la rue Terre du Prince où se trouvent encore les seuls vestiges de cette enceinte. Après cette dernière rue, elle passait au bas de la rue de la Réunion où se trouvait une autre porte, dite « au blé, » puis elle suivait le tracé de la rue des Cinq Visages, pour revenir à la rue de la Grosse Pomme. Mais avec le temps cette fortification devenue obsolète depuis le construction de l'enceinte communale autour de l'agglomération montoise, disparut peu à peu (voir rue Terre du Prince) et, d'après le plan de Jan Bleau (ca 1646), des maisons vinrent occuper les deux côtés de la rue de la Grosse Pomme (comme c'est toujours le cas rue de la Chaussée, Grand-Rue, des Capucins, et de la Petite Guirlande).
Lorsque le grand portail ouest de la collégiale fut enfin terminé, ces maisons disparurent suite à la construction, en 1697,d'une muraille le long de la rue pour créer un parvis au devant de celui-ci. On y installa un escalier à deux volées de onze marches plus quatre dans le porche, pour servir d’accès au grand portail depuis le parvis afin de permettre le passage des processions depuis la rampe Sainte-Waudru. Une esplanade de forme arrondie reliait les trois volées. Cet escalier est resté en place durant tout le XVIIIe siècle. Signalons au passage que sur ce parvis se situait également un cimetière, dit des Innocents parce qu'il était réservé aux enfants, qui surplombait la rue de la Grosse Pomme.
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Mais le 12 mars 1827, cette muraille de soutènement qui longeait la rue de la Grosse Pomme, haute de plus de quatre mètres, s'est brusquement écroulée. Alors, les autorités ecclésiastiques et communales décidèrent d’en profiter pour construire un grand escalier, plus majestueux, qui, cette fois, descendrait jusqu’à la rue. Le 22 octobre 1840, les travaux commencèrent et durèrent jusqu’en 1844, mais, en raison d'un changement malencontreux des plans en cours d'exécution, l’escalier fut non seulement jugé d'aspect trop lourd mais on lui reprocha aussi de masquer, depuis la rue, tout le bas du grand portail de la collégiale. Il déplut, même tellement qu’il ne fut jamais inauguré. Plus tard, en 1858, des travaux nécessaires de réparations furent entamés mais ne furent jamais achevés, pour on ne sait quelle raison, et tout resta en l'état d'abandon jusqu'en 1896.
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Entre-temps, en raison de l'important développement que connut le chemin de fer depuis son arrivée à Mons en 1841, le besoin de relier le centre historique de la cité avec cette nouvelle porte d’entrée s'était fait rapidement sentir, notamment lors de la construction, dans le dernier quart du XIXe siècle, de la nouvelle gare et du quartier qui se développa autour. Le seul moyen étant de percer de nouvelles voiries et consentir à de nombreuses démolitions, la Régence s'y attela avec détermination : La rue de la Houssière fut d'abord percée, puis la rue des Repenties, reliant la rue des Ursulines à la rue de la Grosse Pomme, fut élargie par de nombreuses démolitions ; enfin l'encloître séculaire fut percé, la place du Chapitre abaissée et une nouvelle rue creusée au travers des anciens jardins des maisons de chanoinesses, jusqu'au niveau de la rue de la Grosse Pomme.
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Ces travaux de percement de la nouvelle rue du Chapitre entraînèrent le réaménagement complet du grand escalier dont la hauteur fut quelque peu réduite et les lourds parapets de pierres remplacés par des garde-corps en fer forgé plus aériens. Ces travaux, entrepris sous la direction de l’architecte Joseph Hubert, architecte de la Ville, ne se terminèrent qu'en 1898, mais, désormais, le passage vers la gare était établi et la vue depuis la rue vers le grand portail améliorée. La rue de la Grosse Pomme venait, ainsi, de connaître son deuxième grand bouleversement.
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De l'autre côté de la rue s'étendait sur une bonne partie de sa longueur deux importantes constructions dont voici l'historique : en 1616, la communauté des Carmélites, lorsqu'elle voulut s'installer à Mons, fit l'acquisition de l'hôtel particulier de Charles de Gavre, comte de Fresin situé face à la collégiale. Mais les religieuses ne le conservèrent pas longtemps car, dès 1630, elles le quittèrent pour de plus vastes installations qu'elles avaient fait construire dans le quartier du Trou Boudin. Le bâtiment devint alors, pour quelque temps, le refuge de l’abbaye de Lobbes. Ensuite, il fut acquis et aménagé par la famille de Ligne pour lui servir de résidence montoise, bien qu'il ne fut jamais très fréquenté par leurs propriétaires qui préféraient leur séjour de Beloeil, de Baudour ou encore Paris ou Bruxelles, quand ce n'était pas Vienne. Le dernier fut Charles de Ligne, Grand Bailli de Hainaut qui le délaissa totalement. En partie incendié en 1792 et inoccupé depuis, il fut racheté et restauré en 1828 par la Commission des Hospices Civils, et devint en 1841 l’Hospice des Incurables, également appelé de la Grande Aumône. C’était une institution charitable qui dépendait du Bureau de Bienfaisance, et qui était destinée à soigner les personnes indigentes dont le service était assuré par les Sœurs de Charité, de Gand. Enfin, en 1926, il fut vendu à la Société Nationale des Chemins de Fer pour devenir le siège de la direction du groupe de Mons.
Cet imposante bâtisse était accolée sur sa gauche par un autre bâtiment de taille importante, construit en 1762. En 1890, la Commission des Hospices y transféra la maternité et l’école d’accouchement, institutions créées en 1825 et précédemment installées à la rue Chisaire puis dans les locaux de l'ancienne abbaye du Val des Écoliers. Celles-ci furent transférée en 1927 à l’Hôpital civil du boulevard.
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Le 16 mai 1940, au moment de leur retraite devant la poussée des Allemands, les troupes françaises qui occupaient l'hôtel des Chemins de Fer, voulant détruire les archives afin que l’envahisseur ne puisse s’en servir à des fins militaires, incendièrent l’édifice. Les bombardements allemands firent le reste et il n’en resta que des murailles calcinées.
Après la guerre, on hésita à le reconstruire, mais finalement il fut décidé de le raser afin de dégager complètement la vue sur le grand portail de la collégiale (jusque-là,elle n'était que partielle, par le square des Repenties) en créant un vaste square au devant et, en même temps, établir une communication en ligne droite depuis la place du Chapitre vers la gare. En effet, jusqu'à cette date, le plus court chemin vers celle-ci devait contourner ce vaste bâtiment.
A la place de l'ancien hospice, on créa, en 1961, un square à qui l’on donna le nom du président des Etats-Unis décédé peu avant la fin de la guerre 40-45, Franklin Delano Roosevelt. L’hôtel des Chemins de Fer fut reconstruit à la même époque, de l’autre côté de la nouvelle voirie, sur un nouvel espace dégagé par la démolition d'anciens immeubles donnant sur la rue Fétis. Par la même occasion, on put rectifier la ligne de tram qui joignait la Grand Place à la gare (de 1934 à1973). C'est ainsi que la rue de la Grosse Pomme dont il reste néanmoins quelques intéressantes maisons des XVIIe et XVIIIe siècles, connut son troisième et dernier bouleversement.
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Photos :
Aperçu des maisons d'habitation situées devant la collégiale romane, rue dessous l'Encloître. Extrait du plan Blaeu.1646. BUMons.
La rue de la Grosse Pomme avant le percement de la rue du chapitre. Photo A. Stalport.1896. Coll. S. Ghiste.
Plan de l'ancien escalier de la collégiale Ste-Waudru par François Joseph Demarbaix.1784. BUMons.
Représentation de l'ancien grand escalier de la collégiale, démoli en 1840. BUMons.
Travaux de démolition de l'encloître du Chapitre.Photo anonyme. FAPMC.
Démolition des fondations des maisons de l'Encloître. Photo anonyme. Coll. S. Ghiste.
Grand escalier de la collégiale en ruine. Photo A. Stalport ou E. Quéquin. 1896. Coll. JP Hubens.
La nouvelle rue du Chapitre vers l'hospice de la Grande Aumône. Photo anonyme.FAPMC.
Façade de l'hospice de la Grande Aumône. Fin XIXe siècle. Photo anonyme. FAPMC.
L'hospice de la Grande Aumône côté jardin. Fin XIXe siècle. Photo anonyme. FAPMC.
L'hôtel des Chemins de Fer incendié vu depuis le rue du Chapitre. Photo anonyme.FAPMC.
L'hôtel des Chemins de Fer incendié vu depuis le parvis de la collégiale. Photo anonyme.FAPMC.
Le futur square Roosevelt vers 1950. Photo anonyme. Coll. de l'auteur
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