RUE DE L'ATHÉNÉE
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Avant de porter le nom de l'établissement d'enseignement bien connu des Montois, cette rue porta depuis le XVIe siècle le nom de rue du Séminaire dont les bâtiments, construits en 1619, occupaient tout le coin des rues Rogier et de l’Athénée actuelles.
Le séminaire Notre-Dame de Mons fut fondé en 1611 par Antoinette Godin, déjà fondatrice du collège des jésuites comme établissement d'enseignement. Au début, il fut suffisamment doté pour accueillir plusieurs étudiants pauvres, les boursier qui, alors, formaient la majorité des pensionnaires. Cependant au fil du temps, la tendance s'inversa et la majorité de ceux–ci fut formée par les enfants des grandes familles et de la haute aristocratie (qui y logeaient avec leur précepteur et leur personnel domestique). Il abritait également quelques candidats au sacerdoce qui y suivaient des cours de théologie. Á partir de 1620, l'institution fut dirigée et gérée par les jésuites.
Après la suppression de l’ordre des jésuites, en 1773, l'institution ferma ses portes et les bâtiments furent occupés par les pensionnaires de l’École Préparatoire du Collège de Houdain. Par la suite, la ville ayant racheté les bâtiments, elle y installa en janvier 1780 les humanités du Collège de Houdain, qui devint, de 1780 à 1830, le Collège de Mons. Les cours comprenaient l'enseignement du français, les langues anciennes, l'histoire, la géographie, les éléments des mathématiques ; l'enseignement plus expérimental des sciences ne s'imposant que plus tard.
Une nouvelle loi, tournant décisif dans l'enseignement moyen fut promulguée le 1er juin 1850, instaurant la création de dix Athénées en Belgique. Pour cela, la ville devait mettre à la disposition du Gouvernement un local convenable et un matériel scolaire dont l'entretien demeurait à sa charge. C'est ainsi que le Collège de Mons devint Athénée.
Bien que remaniés en 1821, les bâtiments, devenus trop vétustes, furent entièrement démolis et reconstruits au même endroit en 1883-1888. Ce sont les bâtiments actuels.(composition de style flamand due aux architectes Antoine puis Alexandre Trappeniers de Bruxelles). En dehors de l’habitation du préfet et l'entrée du pensionnat, les terrains à front de rue Rogier sur une profondeur de 15,50 mètres furent vendus à des particuliers pour donner une suite attractive aux nouveaux aménagements de la place de la gare, très fréquentés.
Pour y installer l'école primaire préparatoire à l'Athénée, la ville fit l'acquisition de l'ancienne demeure de Mr François Eugène Becasseau, vaste immeuble voisin, flanqué d'un élégante verrière (malheureusement disparue depuis) et présentant un remarquable portail d'époque Louis XVI.
A remarquer, dans cette rue, l'ensemble symétrique de style néo-classique constitué par les n° 5 à 17 dont les colonnes toscanes engagées rythmant les façades sont en fait des éléments de récupération réutilisés par le promoteur de l'époque (XIXe siècle).
Photos :
Situation de l'ancien Séminaire de Mons. Extrait du plan Goffaux. 1828
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Façades du Séminaire. Dessin de Léon Dolez. 1885. BUMONS.
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Façade de l'Athénée Royal. Carte postale début XXe. Ed. P. Scattens. Coll. De l'auteur.
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L'ancienne maison de François-Eugène Bécasseau. Carte postale oblitérée en 1904. Ed. Géradon, Liège. Coll. De l'auteur.
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Colonne engagée dans la façade du N° 11 de la rue de l'Athénée. Photo de l'auteur.
RUE DU GOUVERNEMENT
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Cette rue tire son nom de l'hôtel abritant le gouvernement du Hainaut, installé par hasard dans cette rue.
A la fin du XVIIe siècle - héritage du Moyen Age, plusieurs autorités se partageaient le pouvoir à Mons et dans le Hainaut. Il y avait le pouvoir communal dont l'organe supérieur était le Conseil du Magistrat, s'étendant sur la ville, sa banlieue et le Souverain Chef-lieu ; ensuite il y avait le pouvoir provincial, coiffé par le Grand Bailli appuyé sur les États (formés des représentants de la Noblesse, du Clergé et du Tiers-Ordre) et les Conseils ; il y avait, enfin, le Chapitre des chanoinesses, mais qui avait un statut voisin de l'extraterritorialité. Il y avait aussi le pouvoir militaire, c'est à dire le Grand Bailli, chef plus ou moins théorique de l'importante garnison stationnée à Mons. 1
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Au cours du siège de la ville par Louis XIV en 1691 et de l'occupation qui s'ensuivit, l’hôtel de Naast, la résidence du Grand Baili, ayant été complètement détruit par les bombardements, on réquisitionna pour le gouverneur militaire français, Nicolas de la Brousse, comte de Vertillac2, l’habitation d’un particulier, Joachim Biseau, située à la rue du mont Escouvet, à laquelle on adjoignit diverses autres propriétés voisines dont le jardin de la confrérie des arbalétriers de Notre-Dame, pour en faire le nouvel Hôtel du Gouvernement. Six ans plus tard, une fois les français partis, le Grand Baillage du Hainaut s’y installa. C’est à partir de ce moment-là que cette portion de la rue prit le nom de rue du Gouvernement.
Sur la vue ci-contre, l’on voit que l’édifice était constitué de deux parties. L’une, à gauche, était l’ancien hôtel du Grand Baillage de Hainaut qui avait été réaménagé et embelli en 1754-1755, pour permettre à Anne Charlotte de Lorraine (1714 - 1773), princesse royale (sa mère était nièce de Louis XIV), sœur de Charles de Lorraine, gouverneur des Pays-Bas autrichiens, chanoinesse représentant l'abbesse du Chapitre de Sainte Waudru, l'impératrice Marie-Thérèse d'Autriche au titre de comtesse de Hainaut, de venir s’y installer avec toute sa cour. Les séances du Conseil Souverain du Hainaut se tinrent dès lors, et jusqu' en 1772, dans l'ancien refuge de l'abbaye de Saint-Ghislain (situé dans l'actuel îlot de la Grand-Place)
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La façade datait de cette époque. (elle a été démontée vers 1957, numérotée et stockée dans les bâtiments des travaux publics à la rue des 3 boudins, tandis que le portail a été remonté (un pilier est neuf) à l’entrée de l’ancienne maison du gouverneur rue Notre-Dame Débonnaire (actuellement démonté, il doit être replacé à ce même endroit à la fin des travaux). Notons en passant qu’un autre hôte illustre y séjourna en 1815 : Le roi de France Louis XVIII de retour d’exil après les Cents Jours et la défaite de Napoléon à la bataille de Waterloo.
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L’autre partie est plus récente et a été construite en 1842-1844 sur les plans de l'architecte Jean Baptiste Huriau pour abriter l’hôtel du gouverneur et la salle des séances du Conseil provincial. Cette salle a fait l’objet d’un agrandissement en 1890-1891. A l’arrière, se trouvaient différents bâtiment, ancienne orangerie, serres et dépendances, dont un vaste jardin s’étendant jusqu’à l’arrière des maisons situées rue Verte, de Nimy et Damoiseaux.
L’ensemble fut démoli en 1960 pour faire place au nouveau palais du Gouvernement provincial.3 Bientôt suivi de la disparition de tout le quartier voisin situé entre le Marché aux Poulets et la rue de la Raquette, pour permettre l'édification du bâtiment de la Régie des Télégraphes et téléphones.
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Ces nouvelles constructions ont mutilé tout ce coin de Mons datant du XVIIIe siècle. Il est assez difficile de comprendre (et de pardonner) les motivations qui ont pu pousser nos édiles communales, dans les années 50 – 60, à saccager tout un quartier pourtant homogène, parfaitement intégré dans le tissu urbain. (Il est vrai que la mise à l’étude de ce projet datait de la fin des années trente, et c’est la seconde guerre mondiale qui est venue retarder l’exécution de cet aménagement urbain désastreux.)
Quelles nécessités entraînait, donc, d’installer à ce prix ces institutions en plein centre ville ?
A cela, diverses raisons : Réaffirmer la prééminence de la ville en tant que chef lieu de la province par la construction d’un nouveau siège du gouvernement provincial, plus moderne, plus fonctionnel, plus imposant, en remplacement de l’ancien hôtel du XVIIIe . Pour ce faire, plus de la moitié de la rue Verte sur sa longueur ainsi qu’un des côtés de la première partie de la rue du Gouvernement seront démolies.
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Faire place au modernisme en remplaçant la vielle tour du téléphone par un vaste bâtiment dédié à la Régie des Télégraphes et Téléphones, les rues des Fossés et de la Raquette y laisseront un de leurs côtés, puis, mais plus tard (1979 – 1988), en édifiant un autre bâtiment de prestige rassemblant les nouvelles reines de la communication : la radio et la télévision.
Permettre une extension du Palais de Justice trop à l’étroit dans ses locaux en rebâtissant à l’arrière de la façade (classée) de l’ancien refuge de l’abbaye d’Hasnon une annexe donnant sur la place de Bootle.
Enfin, créer des parkings pour permettre à tout ce petit monde de trouver place pour y entreposer leur véhicule 4.
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1Roger Rapaille. La capitulation de la ville de Mons en 1691. Acam, tome 75. P.62.
2 Voir Le secret du ouverneur de Mons. Philippe Yannart. Ed. HCD. 2013.
3 Quelques façades intéressantes de la rue Verte et de la Raquette démontées et numérotées ont été déposées au musée Chanoine Puissant.
4Un nouveau projet controversé vient d'être présenté par un promoteur immobilier pour rénover le quartier
Photos :
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Façade de l'ancien hôtel du Grand Baillage. Photo anonyme. FAPMC.
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Façade de l'ancien Hôtel du Gouvernement. CP non datée. Ed. Balasse Mons. Coll.de l'auteur.
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Cour intérieure de l'ancien Hôtel du Gouvernement. Photo anonyme. FAPMC.
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Jardins de l'ancien Hôtel du Gouvernement. Photo anonyme. FAPMC.
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Construction du nouveau bâtiment du Gouvernement Provincial. Côté rue du Gouvernement. Photo J. Cavenaile. FAPMC.
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Construction du nouveau bâtiment du Gouvernement Provincial. Côté rue Verte. Photo J. Cavenaile. FAPMC.
RUE DE LA SEUWE
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Cette rue a été créée récemment lors de l'aménagement de l'îlot de la Grand-Place dans les années 1970-1980, après démolition de la grande bâtisse faisant face à l'Hôtel de Ville, bâtisse qui avait abrité, au début du XXe, le Grand Bazar Parisien, magasin où l’on trouvait tous les articles nécessaires à la vie quotidienne et, notamment, pour les enfants, des jouets. En 1901, il était tenu par Louis Thélinge. Il fur repris de 1915 à 1925 sous le nom de « Grand Bazar de l’Hôtel de Ville » par Georges Valbonnet, puis, sous le nom de « Bazar de la Grand Place » par G. Ollier, qui possédait déjà celui de la rue de la Petite Guirlande et qui était probablement parent de P. Ollier qui tenait celui de la Gare. Au cours de la première guerre mondiale, il dut fermer ses portes sur réquisition de l'occupant allemand, qui y installa un « casino » pour ses soldats.
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Par la suite le bâtiment fut occupé par un café appelé « Le Floréal », qui ferma ses portes en 1974. La brasserie Artois, propriétaire des lieux, voulut le démolir pour reconstruire à sa place un ensemble formé de deux brasseries au rez de chaussée, et d’appartements ou de bureaux aux étages afin de mieux assurer sa représentativité à Mons. Malheureusement le projet n’aboutit pas suite à de nouvelles modalités de représentation des différentes marques de bières dans le réseau des débits de boisson, survenues entre-temps. Revendu, le bâtiment fut démoli en septembre 1978, pour y installer un centre commercial surmonté d'appartements. C'est l'actuel Ilot de la Grand-Place. Le bâtiment à front de la place fut encore remanié en 2004.
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Ce nom de rue de la Seuwe provient du ruisseau (ou « seuwe » en montois, saiwe en Liègeois qui signifie canal d 'écoulement), qui traversait autrefois la Grand-Place après avoir dévalé, à ciel ouvert, la rue des Clercs. Il était alimenté en permanence par les terres hautes de la ville. Il passait sous la maison dite « Á la Seeuwe », face à l'Hôtel de Ville, dans un conduit voûté et terminait son cours par le biais d'une canalisation découverte, dans un puits situé rue des Fossés, au bout de la rue du Miroir. 1
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Ce ruisseau longeait le refuge de l'abbaye de Saint-Ghislain, qui existait depuis le début du XVIe siècle. L'ensemble occupait un vaste quadrilatère irrégulier borné par le côté est de la Grand-Place, la rue d'Havré et la section de la rue des Fossés, (devenue depuis la rue de la Peine Perdue). On sait qu'au milieu du XVIIe siècle, certains bâtiments furent détruits pour laisser place à de nouveaux, plus adaptés. Au mois de février 1726, la communauté religieuse vendit son hôtel à François Cornet, comte d'Elzius, membre du conseil de Hainaut, et, dès le mois d'octobre de cette même année, celui-ci fut autorisé à édifier cinq petites maisons à front de la rue des Fossés, à la place de la muraille fermant le jardin du refuge (Il en subsiste encore deux, les trois autres ayant été anéanties par un bombardement lors de la seconde guerre mondiale).
Au milieu du XVIIIe siècle, l'ancien refuge fut vendu au gouvernement des Pays-Bas pour accueillir, de 1754 à 1772, les séances du Conseil Souverain de Hainaut, parce que les anciens locaux du Grand Baillage avaient été attribués à la princesse Anne-Charlotte de Lorraine, représentante de Marie-Thérèse d'Autriche, abbesse du Chapitre noble de Saint-Waudru.
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Après cette date de 1772, le Conseil ayant réintégré ses locaux de la rue du Gouvernement, les bâtiments furent transformés en caserne de gendarmerie et garda cette fonction jusqu 'en 1877. Par la suite, ils furent rachetés par un négociant en vins qui y établit ses entrepôts jusqu'en 1969. Pour ce faire, il avait fait démolir l'ensemble et creuser 14 galeries en sous-sol, longues chacune de 60 mètres pour servir de caves, tandis que le rez-de-chaussée, garni de caveaux, servait à la vente.. Ces entrepôts furent démolis lors de l'aménagement de l'îlot de la Grand-Place. 2 De l'ancien refuge de l'abbaye de Saint-Ghislain, subsiste, seul, le portail d'entrée qui donnait sur la cour (à côté du n°23 de la rue d'Havré).
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1 Christiane Piérard. La grand-Place de Mons, étude architecturale. Bulletin de la Commission Royale des Monuments et des Sites. 1973.
2 Gaston Bardet. L'urbanisme. Quartier Mons. Ed. Mardaga, 1972.
Photos :
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Grand bazar de l'Hôtel de Ville. Carte postale non datée (avant 1914). Coll. De l'auteur.
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Construction des appartements de l'Ilot de la Grannd-Place. Photo anonyme. FAPMC.
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Situation de la caserne de la Maréchaussée occupant les locaux de l'ancien refuge de l'abbaye de St-Ghislain. Extrait du plan Goffaux, 1828.
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Plan (de l'étage) de la caserne de la Maréchaussée (Bruno Van Mol, les fortifications et les installations militaire du XVIe au XVIIIe siècle.
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Ancienne entrée du refuge de l'abbaye de Saint-Ghislain. (à droite derrière l'homme). Carte postale début XXe siècle.
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